Nous vous en parlions dans un précédent article, la France devait lancer une expérimentation concernant le cannabis thérapeutique dès la fin 2019. Validée par un comité d’experts, cette dernière devait permettre l’utilisation de la plante « dans certaines situations cliniques et en cas de soulagement insuffisant ou d’une mauvaise tolérance des solutions thérapeutiques existantes ». Seulement voilà, plusieurs mois après ces déclarations d’intention, la situation est toujours au point mort.

Une tribune pour dénoncer l’inaction du gouvernement

51 médecins et responsables associatifs ont co-signé en début de semaine une tribune dans le Parisien, appelant le gouvernement à prendre « des décisions politiques fortes ».

Souhaitant un démarrage rapide de l’expérimentation du cannabis thérapeutique en France, ils déplorent un projet laissé au point mort : cela fait déjà deux ans qu’un comité pluridisciplinaire de l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé) a jugé scientifiquement pertinente la mise à disposition des malades peu ou pas soulagés par les traitements existants des produits thérapeutiques à base de cannabis.

Un an que l’article 43 du 24 décembre 2019 sur le financement de la sécurité sociale a été présenté à l’assemblée. Cet article visait à autoriser «dans le cadre d’une expérimentation de politique publique, l’usage médical du cannabis sous la forme de produits répondant aux standards pharmaceutiques ».

Or, à l’heure où ces lignes sont écrites, le décret d’application de cet article 43 n’est toujours pas paru, car sans cesse repoussé. Sans lui, l’autorisation des médicaments à base de cannabis ne peut être réalisée…

Autre problème et de taille, celui du financement : cette question n’ayant toujours pas été tranchée, les signataires de la tribune redoutent qu’il n’y en ait tout simplement pas… Ceci réduirait alors considérablement la portée de l’expérimentation, car la France serait alors entièrement dépendante de la générosité de pays producteurs de cannabis thérapeutique qui devraient lui fournir leurs produits gracieusement. Sans financement, les professionnels de santé ne pourraient pas non plus être correctement formés à ces nouveaux produits…

La situation semble donc figée, au point que la cinquantaine de signataires s’interroge légitimement sur «la volonté politique de mettre réellement en place [cette expérimentation] »…

L’incompréhension et l’impatience pour ces professionnels de santé et leurs patients

La tribune se fait l’écho d’un espoir déçu et d’une colère grandissante : à minima, ce sont 3000 patients souffrant de douleurs chroniques, de contractions musculaires très douloureuses, de sclérose en plaques, de complications liées à un cancer ou bénéficiant de soins palliatifs qui pourraient en bénéficier. L’annonce de cette expérimentation ayant déjà eu lieu, nombre d’entre eux réclament légitimement l’accès à ces nouveaux traitements, ce qui met le personnel soignant dans l’embarras car il est dans l’impossibilité d’accéder à leur requête pour les raisons que nous avons vues plus haut…

Pour les médecins signataires, l’incompréhension est également palpable : la tribune rappelle que les professionnels de santé « manient d’autres médicaments stupéfiants au quotidien, dont certains plus à risque de dépendance, voire de surdose » : des médicaments à base de cannabis n’auraient donc rien d’exceptionnel pour ces derniers, qui cherchent juste de nouvelles possibilités pour soulager leurs patients.

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Il semble que comme souvent, la volonté politique recule dès qu’il est question de cannabis. Le bon sens voudrait pourtant que cette plante puisse être utilisée pour soigner, comme c’est déjà le cas dans de nombreux pays… Espérons que cette tribune puisse être entendue et que les déclarations d’intention finissent par enfin donner lieu à des changements concrets. Dans le meilleur des cas, c’est-à-dire si le décret d’application de l’article 43 venait à être signé dans les jours qui viennent, les premiers traitements à base de cannabis ne pourraient être proposés aux patients qu’à compter du premier trimestre 2021…

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Source :

  • Le Parisien